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livraison, à analyser le travail de M. Mazoyer, sur les difficultés que peut faire naître, en matière de distribution par contribution, l'ordonnance du 3 juillet 1816 sur les dépôts et consignations, et le mémoire de M. Ducos, sur les partages d'ascendants; mais nous trouvons rappelé avec détail le mémoire de M. G. Demante, sur le legs fait à un héritier sans clause de préciput, et complétement reproduits les travaux de M. Benech, sur l'élément gallique et l'élé ment germanique dans le Code Napoléon; de M. Delpech, sur les enfants nés hors mariage; de M. Cazes, sur l'institution du jury. Dans son travail, M. Cazes a démontré tous les vices du fonctionnement actuel du jury et les modifications qu'il y a lieu d'y apporter. Nous dirons volontiers avec ce digne magistrat, au sujet des circonstances atténuantes appliquées par le jury: « Ce travail d'analyse morale, qui fait pénétrer dans les profondeurs intimes d'une conscience coupable l'oeil scrutateur de la justice, demande une application constante, des habitudes d'investigation judiciaire, qu'on ne peut exiger ni attendre de ces hommes qu'une mission temporaire appelle à participer accidentellement à l'administration de la justice. » Et, quant à la composition elle-même du jury, nous ajouterons avec lui : « Si le bon sens et la probité sont des conditions indispensables pour décider de l'honneur et de la vie des hommes, elles ne sont pas suffisantes. La probité qui inspire, le bon sens qui conseille, demandent le concours de l'énergie morale qui détermine la volonté. Choisissez pour rendre la justice, selon le précepte du législateur des Hébreux, choisissez d'entre tout le peuple les plus courageux et les plus fermes! >>

Des travaux aussi importants que ceux que l'Académie a produits méritent la plus grande publicité; œuvres de jurisconsultes, de professeurs et de magistrats distingués, ils doivent enrichir la science et être utiles au pays: espérons donc que le recueil de l'Académie les reproduira complétement à l'avenir.

FÉRAUD-GIRAUD,

Docteur en droit, conseiller à la Cour d'Aix.

THÉORIE DES ACTIONS POSSESSOIRES, par M. MIROY, ancien juge de paix du canton de Grandpré (Ardennes). Vouziers et Paris. Durand, rue des Grès, libraire. 1853, in-8. Prix, 5 fr.

La théorie des actions possessoires n'est ni sans difficulté ni sans importance dans notre droit moderne. D'une part, elle fait naître des questions sur lesquelles la doctrine est loin d'être fixée, et,

d'autre part, la possession attribuant certaines prérogatives à celui qui possède, on comprend de quel intérêt il est pour lui d'être maintenu où d'être rétabli dans sa possession. Néanmoins, notre législateur a cru.devoir soumettre le jugement des actions possessoires aux juges de paix.

Nous sommes loin de blâmer cette attribution de compétence qui leur a été faite : elle se justifie par bien des motifs, mais elle exige de la part de ces honorables magistrats une connaissance particulière de tout ce qui est relatif aux actions possessoires, législation, doctrine, jurisprudence. Les ouvrages où ils peuvent puiser cette connaissance ne manquent assurément pas, mais on comprend que pour eux cette matière doit être traitée à un point de vue différent de celui sous lequel l'ont considérée les commentateurs de nos Codes. C'est surtout au point de vue de l'utilité pratique que doit être exposée la théorie des actions possessoires. M. Miroy l'a compris : aussi s'est-il moins occupé de faire une œuvre originale, remarquable par des dissertations sur les points contestés de son sujet, que de réunir dans son livre ce qui pouvait être utile aux juges de paix. Il n'a pas craint de citer les auteurs qui ont traité les questions relatives aux actions possessoires, et de donner leur opinion au lieu de la sienne propre. « Quand on trouve, dit l'auteur, un guide sûr, pourquoi s'égarer en suivant ses propres inspirations? » Ce guide sûr, que M. Miroy a choisi sur bien des points, c'est le savant commentateur de notre Code civil, l'auteur du traité de la Prescription, M. le premier président Troplong. Quoique nous ne puissions que féliciter l'auteur sur le choix d'un pareil guide, nous ne pouvons nous empêcher de remarquer que M. Miroy a peut-être trop largement puisé dans son livre. Les fragments qu'il en a cités dépassent de beaucoup la mesure ordinaire des citations.

M. Miroy ne suit pas cependant le sentiment de M. Troplong au point de n'être jamais en désaccord avec lui ou de ne pas le discuter. Dans les questions controversées, il met en présence les opinions diverses des jurisconsultes, et il adopte, après l'avoir examinée, celle qui lui paraît préférable. Ainsi, sur la question de savoir si la réintégrande existe dans notre droit moderne comme action distincte et complétement indépendante de la complainte, l'auteur de la Théorie des actions possessoires adopte l'affirmative, contrairement à l'opinion de M. Troplong et de plusieurs autres jurisconsultes.'

La jurisprudence devait occuper une place dans un livre du genre de celui de M. Miroy; aussi s'est-il bien gardé de la négliger: il en indique, il en rapporte même textuellement les principaux monuments.

L'auteur n'a pas même laissé complétement de côté l'histoire du droit, et, à propos de la complainte et de la réintégrande, il a dit quelques mots d'historique. Nous regrettons seulement qu'il n'ait pas consulté sur cette partie les études historiques de M. de Parieu, qui l'eussent mis au courant des travaux de la science sur celle partie de son sujet, et qui ne lui eussent pas été sans utilité même pour la partie théorique.

Nous terminerons cette rapide appréciation du livre de M. Miroy par l'indication des principales divisions qu'il a adoptées. Il expose la définition et les caractères de la possession; puis il examine successivement quelles sont les choses susceptibles de possession ; la possession utile pour prescrire ; l'action en complainte possessoire; l'action en réintégrande; l'action en dénonciation de nouvel œuvre; la récréance; l'intervention; les demandes en garantie; la règle qui défend le cumul du pétitoire avec le possessoire; la procédure sur les actions possessoires; l'effet du payement au possessoire.

Cette division, qui donne une idée du contenu de l'ouvrage de M. Miroy, fait en même temps connaître le point de vue sous lequel l'auteur a considéré la théorie des actions possessoires. « Nous avons voulu, dit l'auteur dans son introduction, indiquant lui-même le caractère de son œuvre, épargner à MM. les juges de paix des recherches laborieuses, que la variété et la multiplicité de leurs travaux ne leur permettent pas toujours de faire avec succès. » Le but de M. Miroy a été atteint, il a fait un livre utile, qui sera bien accueilli de ceux auxquels il l'a destiné.

C. GINOULHIAC.

TABLEAUX JUDICIAIRES ET ADMINISTRATIFS POUR LE SERVICE DE L'AUDIENCE, LA CONFECTION DES DISTRIBUTIONS ET ORDRES, ET L'ACCOMPLISSEMENT DES OPERATIONS ELECTORALES ET DU RECRUTEMENT, par Antoine-Gaspard BELLIN, docteur en droit, jugesuppléant au tribunal de Lyon. Paris, imprimerie administrative de Paul Dupont, rue de Grenelle-Saint-Honoré, 45.

L'auteur de cette publication, qui remplit avec conscience de modestes fonctions dans la magistrature, a voulu rendre service

aux magistrats et aux administrateurs, en leur traçant un formulaire où se trouvent scrupuleusement retracées les diverses formes dont l'observation leur est prescrite. Nous ne pouvons mieux faire que de laisser développer à M. Bellin lui-même la pensée qui a présidé à l'exécution de ses tableaux judiciaires et administratifs : «< Parmi les personnes appelées à figurer avec des rôles dif«<férents dans l'examen et le jugement des affaires soumises aux << diverses juridictions du pays, il n'en est aucune qui n'ait re<< marqué combien la bonne direction du débat, en matière cor<<rectionnelle ou criminelle, a parfois à souffrir des préoccupations « qu'entraîne avec soi l'observation de formalités légales. L'esprit « des présidents, partagé entre deux soins de nature opposée, «< éprouve quelque peine à maintenir la balance égale entre la << forme et le fond, sans parler de l'amoindrissement des facultés «< causé par la fatigue, lorsque l'audience se prolonge démesuré« ment. Frappé de ces inconvénients, j'ai cherché une combinai<< son qui affranchit les présidents de tout souci extérieur, et leur << permit de concentrer toute leur attention exclusivement sur l'in<< terrogation, sur les dépositions des témoins, sur les éléments << sérieux de décision. » La même observation s'applique à la justice civile et aux opérations administratives. M. Bellin a suivi avec une scrupuleuse fidélité le plan qu'il s'est tracé, et son livre épargnera bien des fatigues et bien des recherches aux magistrats de l'ordre judiciaire et administratif qui voudront y recourir pour faciliter l'exercice de leur ministère, souvent si pénible.

L'auteur ne s'est point livré d'ailleurs exclusivement à des travaux purement pratiques; son esprit, qu'il sait assouplir avec une laborieuse patience aux détails des lois de procédure et des tarifs civils et criminels, s'est exercé sur des questions d'un ordre plus général. Il a publié, en 1846, un opuscule sur les avantages du concours appliqué au recrutement du personnel administratif et judiciaire(1). De pareilles idées, il faut l'avouer, ne sont plus à l'ordre du jour; et, loin d'étendre l'institution du concours, la tendance actuelle est de lui substituer la nomination directe. Quant à nous, dût-on nous qualifier de retardataire, nous persistons à croire, avec M. Bellin, qu'il y aurait profit pour le pouvoir luimême à n'admettre les candidats aux fonctions publiques qu'après

(1) Voyez notre compte rendu, dans la Revue du droit français et étranger, année 1846; Bulletin bibliographique, page 17.

des épreuves sérieuses, ainsi que cela se pratique, du reste, dans

d'autres pays (1).

E. BONNIER,

Professeur à la Faculté de droit de Paris.

DES PRIVILEGES SUR LES droit, avocat à Paris, etc. in-8°. Prix, 3 fr.

MEUBLES, par M. TAILLEFER, docteur en
Paris, A. Durand, libraire, rue des Grès, 5.

Il est peu de parties dans notre Code civil qui nous paraisse aussi bien faire le sujet d'une bonne dissertation, que celle qui régit les priviléges sur les meubles. La matière y est bien tranchée, elle est concentrée en quelques articles qui donnent lieu à de sérieuses difficultés et font naître plusieurs questions délicates. Ainsi, ce sont d'abord les motifs qu'a eus le législateur pour déclarer certaines créances privilégiées, puis les expressions mêmes dont il s'est servi, qui fournissent matière à discussion. Telle créance est-elle ou non comprise parmi celles qui sont privilégiées? Quel rang faut-il accorder aux priviléges? Les privilèges généraux doivent-ils primer les priviléges spéciaux, ou bien au contraire les priviléges spéciaux doivent-ils primer les priviléges généraux ? Ce sont là quelques-unes des questions qu'on rencontre dans cette partie du droit, el que M. A. Taillefer n'a pas manqué de traiter.

Ecrite de ce style qui convient aux matières de droit, sa dissertatation ne nous a paru laisser inexplorée aucune des difficultés de son sujet. Elles sont toutes examinées et résolues avec soin. Les opinions diverses qui se sont formées sur chacun des points controversés y sont discutées. Sous ce rapport, la dissertation est complète, et ne laisse à peu près rien à désirer. L'auteur, comme il le dit lui-même dans sa préface, a condensé en peu de pages ce qui, touchant les priviléges sur les meubles, est épars dans tant de volumes.

Quant à la division, elle était indiquée par le législateur, et les commentateurs de cette partie de notre Code n'ont eu qu'à la suivre. Ainsi, l'auteur traite, après des préliminaires et des notions sur les priviléges en général, des priviléges généraux, des privi

(1) La direction croit devoir prévenir les lecteurs de la Revue, qu'en donnant à ses collaborateurs toute liberté d'exprimer leur opinion, elle leur en laisse toute la responsabilité, et ne doit pas être censée la partager, par cela seul qu'elle est ici reproduite.

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