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par le décret du 28 février 1852; et comme ce décret contient, on le sait, cinq titres dont le premier traite des sociétés de crédit foncier en général; le deuxième, des règles relatives aux prêts faits par les sociétés; le troisième, des obligations émises par ces établissements; le quatrième, subdivisé lui-même en deux chapitres, de la purge, puis des moyens particuliers d'exécution des sociétés contre les emprunteurs ; et dont le cinquième enfin renferme les dispositions générales de surveillance, etc., de même la première partie du Traité est divisée en cinq titres, exactement correspondants à ceux du décret.

Nous ne pouvons avoir la prétention, on le comprend, de suivre l'auteur, chapitre par chapitre, dans les infinis détails d'une matière aussi complexe; nous devons nous contenter ici, après avoir signalé l'importance réelle et le mérite général du livre, d'appeler plus particulièrement l'attention des lecteurs sur quelques points spéciaux.

A ce point de vue, nous recommanderons, dans la première section du titre II, les nos 42 à 51, dans lesquels l'auteur examine la question ainsi formulée lorsque la société, par suite d'un prêt fait sur des immeubles grevés de plusieurs inscriptions, aura pris le rang (au moyen de la subrogation par suite de remboursement) du créancier inscrit en première ligne, quelle sera sa situation vis-à-vis des créanciers inscrits dans un rang ultérieur ? Ceux-ci seront-ils tenus de souffrir toutes les conséquences du nouveau prêt, et la substitution de la société dans les droits du premier créancier lui conférera-t-elle ces droits, augmentés de toutes les prérogatives que le décret et les statuts attachent aux créances des sociétés de crédit foncier ? Ce morceau, où la délicatesse des distinctions n'exclut pas la fermeté des décisions, donnera une idée complète de la manière habituelle de l'auteur.

Dans la section II du même titre, nous nous plaisons également à signaler tout ce qui a rapport aux remboursements par anticipation. On sait, en effet, que l'art. 10 du décret du 28 février 1852, spécialement relatif à ce qui constitue l'innovation essentielle du système de crédit foncier, porte: « L'emprunteur acquitte sa dette par annuités; il a toujours le droit de se libérer par anticipation, soit en totalité, soit en partie.» Rien de plus concis, rien de plus simple en apparence; rien cependant qui ait donné lieu à plus de difficultés pratiques dans l'établissement des statuts des sociétés; mais toutes ces difficultés complexes, souvent

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obscures, M. Josseau sait les rendre claires pour l'esprit le moins habitué aux spéculations financières.

Au titre IV, chapitre 1er, relatif à la purge, nous trouvons une énumération des charges occultes qui grèvent les propriétés foncières et une appréciation de leurs dangers, lesquelles dénolent chez l'auteur du traité une connaissance profonde de notre système hypothécaire actuel, de cette législation si rebelle à l'établissement définitif du crédit immobilier.

M. Josseau nous paraît avoir bien déterminé le véritable caractère du droit de séquestre créé au profit des sociétés de crédit foncier, en disant que ce droit participe tout à la fois de la nature du séquestre ordinaire et de l'antichrèse.-Cette simple appréciation est féconde pour la saine décision de plusieurs questions importantes.

Enfin, nous adoptons yolontiers les diverses solutions de plusieurs difficultés de procédure, relevées dans la section III du titre IV, relative à l'expropriation et à la vente. La plupart de ces solutions découlent naturellement d'un principe général, posé tout d'abord en cette matière par M. Josseau, et qui nous paraît jusle, savoir que le législateur, dans le décret de 1852, a moins entendu créer un code complet de procédure spécialement applicable aux sociétés de crédit foncier, que constituer au profit de ces établissements une position privilégiée à certains égards; qu'il a donc procédé plutôt par indication des mesures exceptionnelles que par voie de réglementation générale, et qu'il en résulte qu'il faut nécessairement recourir au droit commun, en cas de silence du décret du 28 février 1852; et le droit commun, dans la matière qui nous occupe, c'est la loi du 2 juin 1841 sur les ventes judiciaires de biens immeubles, et le Code de procédure civile.

Nous nous permettrons pourtant de critiquer quelques-unes des solutions proposées par M. Josseau; par exemple, nous ne saurions admettre avec lui (n° 231, p. 192) qu'il y ait encore, après la suppression, prononcée par le décret implicitement, du procèsverbal de saisie, nécessité de se munir du pouvoir spécial, dont l'huissier a besoin, en droit commun, aux termes de l'art. 556 du Code de procédure civile, pour pratiquer une saisie immobilière. En effet, le commandement, seul acte conservé par le décret, est plutôt un acte de mise en demeure et d'avertissement de l'exécution qu'un acte d'exécution même. On sait que, dans la pratique, ce n'est que postérieurement au commandement et quelques jours

seulement avant la confection du procès-verbal de saisie, que ce pouvoir spécial est signé et remis à l'huissier; il ne nous paraît pas possible de suppléer au silence du décret pour exiger ce pouvoir dont il ne parle pas, et de créer ainsi un cas de nullité fondé sur l'absence d'un acte, assez inutile d'ailleurs.

Nous croyons aussi que l'auteur se trompe, en embarrassant la procédure rapide, créée en faveur des sociétés de crédit foncier, d'une formalité également inutile, supprimée par le silence du décret : nous voulons parler de la fixation par le tribunal du jour de l'adjudication, fixation réclamée comme indispensable en celte forme, au no 242, page 198 : «Qui doit fixer l'époque de l'ad« judication? dit l'auteur. Ce ne peut être que le tribunal; il est « impossible de laisser à la société poursuivante la faculté absolue « de déterminer celle qui lui convient; c'est à l'art. 695 du Code « de procédure qu'il faut s'en référer. » Mais nous répondrons que le danger redouté par M. Josseau n'existe réellement pas, puisque, par la combinaison même des délais fixés par l'art. 32 du décret, pour les insertions, les sommations et la mise aux enchères, l'époque de l'adjudication se trouve très-suffisamment indiquée, et ne se trouve pas abandonnée, dans des limites périlleuses du moins, aux seules convenances et aux caprices de la société poursuivante.

Si nous en avions le temps et la place, nous essayerions de réfuter l'opinion émise au n° 267, touchant l'appel à l'ordre, après remboursement de l'établissement de crédit foncier, et les règles de compétence applicables en ce cas.

Certaines questions, dont l'examen aurait aussi quelque importance, nous semblent avoir été omises; telles sont, par exemple, celle de la nécessité de la sommation, indiquée par l'article 692 du Code de procédure civile, à faire à un ancien vendeur qui se révèle et s'inscrit postérieurement à la purge, et auquel n'aurait pas été faite la signification prescrite par l'article 24 du décret ;la question de savoir dans quelle forme devront être proposées les nullités invoquées après le dépôt du cahier de charges; celle des délais de distance dans les cas prévus par les art. 36 du décret, 725 et 1033 du Code de procédure civile; et d'autres difficultés encore, qui pourront se présenter dans cette complication d'une législation spéciale, côtoyant ou croisant celle du droit commun, et devront plus d'une fois embarrasser les parties, les juges et les officiers ministériels.

Mais, quel que soit le mérite de notre critique sur un petit nombre de points, l'ouvrage de M. Josseau n'en constitue pas moins un livre remarquable à bien des titres : il servira puissamment à étendre la connaissance d'une institution pleine d'avenir, à faire mûrir et triompher enfin la réforme de notre système hypothécaire.

Le traité de M. Josseau, remarquable par la largeur de ses vues, par les nombreuses et sages décisions qu'il renferme, par sa grande clarté, sera médité avec fruit par l'homme d'Etat aussi bien que par les jurisconsultes, consulté par les magistrats et par les hommes d'affaires, lu et compris sans difficulté par tout le monde. ADOLPHE BREULIER,

avocat à la Cour impériale de Paris.

CODE DE LA VEUVE, par A. VENANT, avocat, ancien avoué de première instance, ancien agréé au Tribunal de commerce de la Seine. Paris, Plon frères, libraires-éditeurs, rue de Vaugirard, 36. 1854, in-8. Prix, 7 fr. 50.

Ce n'est point un traité scientifique des droits et des obligations de la femme devenue veuve qu'a voulu faire M. Venant, il imporle tout d'abord de le constater, c'est un Code, c'est-à-dire une œuvre pratique, qu'il a voulu composer. Voici d'ailleurs comment il expose lui-même, dans son avant-propos, le but qu'il s'est proposé et la manière dont il a procédé dans la composition de son livre. «<Le veuvage, en privant la femme de l'appui tutélaire qu'elle tenait de la nature et de la loi, lui crée subitement une situation toute nouvelle. Il lui ouvre des droits et lui impose des devoirs que, le plus souvent, elle n'a pu ni apprécier ni mesurer à l'avance. L'éclairer sur ces droits, trop fréquemment compromis; lui indiquer ces devoirs; la prémunir, dans un intérêt personnel et dans celui de ses enfants, contre les conséquences d'une fausse direction ou de sa propre erreur : tel est le but que nous nous sommes proposé...... Pour nous faire mieux comprendre de tous, et pour vulgariser le droit, en quelque sorte, nous nous sommes attaché, en citant fréquemment le texte littéral de la loi, à en définir les termes, et à en exposer les motifs. >>

Il ne faut donc pas chercher dans l'ouvrage de M. Venant une discussion approfondie des textes et des questions nombreuses et délicates qui se rattachent à son sujet, ni même l'œuvre d'un jurisconsulte. Tout ce qu'on peut demander à son Code, c'est une expo

sition simple, claire, méthodique et complète des dispositions législatives qui règlent les droits et les obligations de la veuve. Quant à la clarté et à la simplicité, ce sont deux qualités qu'il serait difficile de refuser, en général, sans injustice au Code de la veuve. On pourrait toutefois désirer que l'auteur expliquât, en plusieurs endroits, au lieu de les reproduire simplement, les termes techniques dont s'est servi le législateur. Ainsi l'auteur, parlant de la succession irrégulière des enfants naturels, dit plusieurs fois avec le législateur qu'ils ne sont pas héritiers, qu'ils n'ont que des droits sur les biens de leur père ou mère décédé ; mais il ne dit pas ce que l'on doit entendre par ces mots et en quoi ils diffèrent des droits héréditaires. L'auteur n'explique pas davantage le mot saisine, pour lequel il se borne à dire que c'est la reproduction du vieil axiome la mort saisit le vif.

Quant au plan suivi par M. Venant, nous nous bornerons à l'indiquer brièvement. Dans la première partie, l'auteur traite des droits et des obligations de la femme veuve, c'est-à-dire des droits et des obligations qui naissent du contrat de mariage et des divers régimes d'association conjugale; des cas où la femme est donataire, légataire ou héritière de son mari; des droits de mutation qu'elle peut être appelée à acquitter; des droits et devoirs de la veuve comme tutrice et comme mère, des actes d'administration dévolus à la veuve, et des divers contrats qu'elle peut faire en vertu de cette administration, et de ceux qui excèdent ces limites; des pensions sur l'État auxquelles la veuve peut avoir droit, et de ses droits à la propriété artistique ou littéraire ou à des successions; des libéralités et autres actes que la veuve peut faire ou dont elle peut être l'objet. Dans la deuxième partie, l'auteur expose les droits et les devoirs des femmes mariées, les droits et devoirs respectifs des époux, les droits personnels à la femme mariée, ses droits accidentels en cas d'absence, d'interdiction, de prodigalité, de condamnation du mari, de séparation de corps et de biens, de faillite du mari et dans le cas où elle exerce le commerce. On pourrait, croyons-nous, désirer un plan plus rationnel; mais une table analytique des matières, faite avec soin et très-complète, permet de rectifier ce que l'ordre suivi pourrait avoir de choquant.

Cet aperçu des matières traitées par l'auteur dans son Code doit suffire pour donner une idée du contenu de son œuvre et faire juger si elle est complète. Peut-être même l'est-elle trop, sous cerlains rapports, car l'auteur rattache à son sujet toutes les parties

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