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des communes, restreintes plus tard par l'abus de la puissance féodale, puis par l'action conservatrice de l'administration royale, ces servitudes subsistent encore aujourd'hui, sans qu'on puisse prévoir l'époque où elles pourront être rachetées ou cantonnées. Leur histoire forme un chapitre de l'histoire des communes, et ce chapitre n'est pas le moins important, si l'on songe que dans la plus grande partie de la France des droits d'usage octroyés aux communes naissantes formaient le principal fonds du capital communal.

C'est donc une heureuse idée que d'avoir publié sous ce titre un extrait du grand ouvrage publié par M. E. Meaume, sur l'ensemble du Droit forestier, ouvrage dont la réputation est faite depuis longtemps. Cet extrait, d'un prix beaucoup moins élevé, comprend le commentaire des articles 61 à 121 du Code forestier, et les dispositions corrélatives de l'ordonnance réglementaire. On n'a laissé de côté que ce qui a trait à l'exploitation des bois soumis au régime forestier (art. 1 à 60), et la partie pénale du Code (art. 144 à 225).

Nous n'insisterons pas ici sur le mérite de ce travail, véritable encyclopédie du droit forestier; tout ce qui a été dit, jugé ou écrit sur cette partie de notre législation s'y trouve résumé et mis en œuvre, avec une indépendance remarquable et une grande sûreté de solutions. Les recherches historiques dont on ne peut plus se passer aujourd'hui n'ont pas été négligées. Les dissertations sur l'origine des droits d'usage, de cantonnement et d'affouage, renferment les renseignements les plus curieux et les moins connus. L'intérêt de ces renseignements n'est pas purement théorique. Il n'est presque pas un procès en ces matières où il ne faille remonter à plusieurs siècles en arrière, déchiffrer de vieux titres, interpréter des règlements ou des coutumes dont le souvenir est déjà bien loin de nous. Il suffirait, pour s'en convaincre,`de parcourir les décisions judiciaires rapportées par M. Meaume, et dont un grand nombre, empruntées aux Cours de Colmar, de Nancy, de Metz, de Besançon, étaient jusqu'à présent inédites.

Malgré l'article 61 du Code forestier, on plaide encore et on plaidera longtemps sur ces questions. Les procès qu'elles font nattre sont longs, difficiles, et touchent à de grands intérêts. La législation qui les régit paraît d'ailleurs à l'abri des remaniements et des réformes. Ce sont bien des raisons pour que le Traité des droits d'usage soit favorablement accueilli du public.

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Parmi les nombreuses dissertations que renferme cet ouvrage, nous signalerons surtout celle qui est relative à la prescription du droit d'usage. L'usager porteur d'un titre peut-il établir, à l'aide de la preuve testimoniale, que ce titre n'est pas prescrit? La jurisprudence est aujourd'hui fixée dans le sens de l'affirmative; mais la multiplicité même des décisions rendues montre combien la question a pu paraître douteuse. M. Meaume a su exposer clairement les divers systèmes, réfuter les objections, el donner les véritables raisons de décider. R. DARESTE.

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MANUEL DES AGENTS CONSULAIRES FRANÇAIS ET ÉTRANGERS. Edition considérablement augmentée, par M. MOREUIL, Paris, Videcoq, éditeur, rue Soufflot, 1. 1853, in-8. Prix, 8 fr.

Expliquer les attributions, les droits, les prérogatives et les devoirs des consuls et des agents consulaires et diplomatiques, tel est le but que s'est proposé l'auteur dans cet ouvrage. Ce n'est point une œuvre de science, du moins ce livre ne nous paraît pas devoir être considéré comme tel; mais un manuel, c'est-à-dire un livre de pratique, qui s'adresse à un assez grand nombre de lecteurs, quoiqu'il ne s'occupe que des agents consulaires et ne semble destiné qu'à eux seuls. L'institution consulaire est, en effet, tellement liée au commerce, que les armateurs, les négociants, les navigateurs, qui sont sans cesse en relation avec les consuls, sont aussi intéressés à connaître les lois qui les régissent. Déjà plusieurs traités avaient eu pour objet l'origine et les fonctions des consuls, il en existait même sous toutes les formes; mais il y avait place encore pour un manuel. Nous sommes sur ce point de l'avis de M. Moreuil.

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Plusieurs ordonnances rendues sous Louis-Philippe ont complétement réglé à nouveau tout ce qui concerne les agents consulaires; ce sont ces ordonnances que M. Moreuil a eu à expliquer qui font la base de son travail; et dont il a même suivi les divisions. Dans la première partie, consacrée aux attributions, priviléges, droits et devoirs des consuls, élèves, agents, chanceliers et drogmans, l'auteur traite des consuls en pays de chrétienté, et sous ce titre, des consuls, élèves consuls, des chanceliers, des fonctions des consuls dans leurs rapports avec la marine marchande, des passe-ports, des légalisations, de l'immatriculation, puis des consuls au Levant. Dans le titre troisième sont exposées les dispositions relatives à tous les agents consulaires. La deuxième par

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tie est consacrée aux traités et conventions relatifs au commerce et à la navigation. Il s'agit là des traités avec les diverses nations du globe, qui ont fixé par des dispositions spéciales les droits et les prérogatives, les devoirs et les attributions des consuls depuis la paix de Westphalie. Cette partie est divisée en paragraphes, suivant l'ordre alphabétique. Dans la troisième partie, il est traité de ce que l'auteur appelle la jurisprudence consulaire, c'est-à-dire de certaines questions relatives aux agents consulaires et qui sont agitées et résolues soit par la doctrine, soit par la jurisprudence. Nous avons remarqué quelques negligences dans les citations qui se trouvent dans cette partie; ainsi, nous avons rencontré plusieurs fois cette indication: Jugement de la Cour impériale de Paris. Puis l'auteur n'indique pas d'ordinaire le recueil auquel il emprunte ces décisions, ce qui rend les vérifications difficiles. Enfin, dans les citations des auteurs, il cite quelquefois des ouvrages qui n'existent pas; ainsi il cite Armand Dalloz, Dictionnaire périodique. Ce sont là de bien petites choses, mais c'est dans ces petites choses que l'on reconnaît d'ordinaire le soin que l'auteur a apporté à la confection de son œuvre.

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Outre ces trois parties, on trouve dans le traité de M. Moreuil un appendice considérable dans lequel l'auteur revient, pour les compléter, sur plusieurs des points qu'il a déjà traités dans les diverses parties de son ouvrage. Il y a joint aussi une note sur les législations commerciales dans les principaux Etats modernes, d'après la concordance entre les Codes de commerce étrangers et le Code de commerce français, par M. Anthoine-de-Saint-Joseph. Cet appendice, qu'il serait difficile de s'expliquer si c'était une deuxième édition, a fait de l'ouvrage de M. Moreuil sinon une édition nouvelle, du moins une édition considérablement augmentée, comme l'indique le titre.

M. Moreuil ne s'est pas contenté d'expliquer les lois et d'exposer la jurisprudence en matière consulaire, il a voulu payer lui aussi son tribut à la science, et il a fait précéder son traité d'une introduction historique et politique sur l'origine et le développement des établissements consulaires français à l'étranger. Cette introduction était-elle bien utile en tête d'un manuel? Des notions historiques ne peuvent jamais, croyons-nous, être inutiles; quel que soit le sujet que l'on traite, elles éclairent en même temps qu'elles intéressent le lecteur; mais ces notions doivent être précises et exactes; dans un manuel surtout, point de vague, point de propositions

douteuses. Sous ce rapport, nous le constatons avec regret, l'introduction de M. Moreuil laisse beaucoup à désirer. On y trouve, entre autres choses, indiquées comme faisant le commerce dans les Gaules, des villes qui n'existaient pas à l'époque dont parle l'auteur, puis des propositions un peu hasardées comme celles-ci: « Sans commerce, sans industrie, point de nationalité prépondérante, point de force politique possible, durable; l'histoire ancienne, du moyen âge, moderne est là pour prouver invinciblement la vérité de ce que nous avançons. » En écrivant ces lignes, l'auteur n'a pas pensé à Rome et à son empire, qui fut le plus étendu assurément et le plus durable, et aux développements duquel le commerce et l'industrie ne contribuèrent en rien. Nous ne nions pas qu'il doive en être autrement dans le monde moderne, de grands exemples le prouvent invinciblement. Nous devions seulement relever ce qu'il y avait de trop général dans ce que disait l'auteur en parlant du monde ancien. C'est là un défaut de précision que nous avons remarqué en plusieurs endroits de cette introduction et que nous avons cru devoir signaler à l'attention de l'auteur; il lui sera facile de le faire disparaître dans une nouvelle édition. C. GINOULHIAC.

RECUEIL DE L'ACADÉMIE DE LÉGISLATION DE TOULOUSE, 1851-1852. 1 vol. in-8. 1853. 1re livraison. - Toulouse, imp. de Bonnal et Gibraċ.

Aimer les hautes études, encourager leur culte, leur ouvrir un asile, voilà ce qui distingue certaines cités, et ce qui, de tout temps, a donné à Toulouse une physionomie et une renommée particulières; aussi, nous ne devons pas nous étonner d'avoir vu se former récemment dans cette ville, avec les plus légitimes espérances de succès, à côté de l'Académie des jeux floraux et de l'Académie des sciences, une Académie de législation.

S'il nous eût été permis d'oublier que nous écrivions pour une revue bibliographique, nous aurions volontiers cité les noms des fondateurs de cette Société de jurisconsultes, de professeurs et de magistrats, en rappelant les travaux dont ils ont doté la science du droit. Nous devons à regret nous taire sur les éléments de succès de la nouvelle Académie, à laquelle la prospérité et la célébrité de ses deux aînées ne sauraient manquer, el nous borner à indiquer rapidement les travaux qui sont rapportés ou analysés dans le recueil de cette Compagnie.

Le compte rendu des travaux de l'Académie de législation de Toulouse en 1851 et 1852 a été publié en 1853; il mentionne plusieurs délibérations sur des mesures d'ordre intérieur, l'examen des titres de nombreux correspondants, l'appréciation d'un grand nombre d'ouvrages de droit. On y trouve analysés d'une manière intelligente et substantielle les travaux des académiciens. Voici les matières sur lesquelles les lectures ont porté. Je les classe dans l'ordre dans lequel il en est rendu compte.

M. Dufour a communiqué un mémoire sur le prêt à la grosse, envisagé par rapport au caractère et aux effets de l'affectation sur la foi de laquelle ces prêts ont lieu; M. Demante, sur les vices dont la possession peut être entachée, soit au point de vue de la prescription, soit au point de vue des actions possessoires; M. Capmas, sur l'autorité de la chose jugée dans ses applications à la question de savoir si le débiteur hypothécaire représente ses créanciers; M. Ressigeac, sur la règle catonienne, étudiée successivement sous l'empire du droit romain, de l'ancienne jurisprudence et du droit actuel; M. Derrouch, sur une théorie concernant les tutelles; M. Cassagne, sur les effets de la chose jugée, considérée à un point de vue particulier; M. Rodière, sur les effets déclaratifs du partage; M. Bressolles, sur les rédacteurs du Code Napoléon; M. Molinier, sur la validité ou l'invalidité de la clause compromissoire; M. Benech, sur l'élément gallique et l'élément germanique dans le Code Napoléon; M. Chauveau, sur le tribunal des conflits; M. Laferrière, sur la partie du droit de Justinien suivie en France avant la fin du onzième siècle.

Ce premier volume se termine par le compte rendu du concours ouvert en 1852 sur le régime de la propriété mobilière en France et par la reproduction d'un mémoire délibéré entre 1288 et 1290, par six docteurs ou professeurs en droit, en faveur des habitants de Limoux; ce document inédit, communiqué par M. FondsLamothe, présente un double intérêt pour l'histoire du droit et l'histoire des mœurs languedociennes, à la fin du treizième siècle.

En l'état de l'importance des questions traitées par l'Académie de Toulouse, il est à regretter qu'elle se soit bornée à publier l'analyse de ses travaux, quelque. substantielle que soit cette analyse

Il est à désirer, dans l'intérêt des sciences juridiques, que l'Académie entre dans la nouvelle voie que semble indiquer la première livraison de 1853. On s'est encore borné, il est vrai, dans cette

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