qui font actuellement détenus par quelque maladie aiguë. J'en aurai dit suffisamment à ce sujet, quand j'aurai ajouté que la peste même, qui de toutes les fievres est la plus cruelle, est soumise aussi à cette puissance lunaire. Diemerbroeck, cet Auteur fi expérimenté, & qui a décrit, avec une si grande exactitude, la nazure & les progrès de la peste qui regna, en 1636, à Noyon, observe que cette maladie fit toujours de plus grands ravages aux approches de la nouvelle & de la pleine Lune; qu'un plus grand nombre de personnes en fut attaqué dans ce tems, & que celles-là mouroient presque toutes. (1) On pourroit ajouter plusieurs autres exemples à ceux-ci; mais comme ils feroient fuperflus dans une matiere aussi évidente, je vais achever ce qui me reste à dire sur les crises, En premier lieu, toutes les maladies épidémiques, celles qui se répandent sur le peuple, ont leurs différentes périodes, diftribuées en certains tems, pendant lesquels elles croiffent, reftent dans leur état, & décroissent enfin. Or, ces loix font tellement constantes & immuables, que toutes les fois qu'il y a des maladies épidémiques qui dépendent de la constitution de l'air, la plupart de ceux qui en font attaqués ont une fievre continue, & quelques-uns une intermittente; mais chez ceux-ci les intervalles de relâche sont compensés par le nombre des paroxyfmes, de forte que la durée totale de la maladie est la même pour les uns & pour les autres. Sydenham, ce Médecin si fidele dans l'his toire des maladies, s'étoit convaincu de cette (1) De peste, p. 9. Edit. Londin. vérité par la seule expérience. (1) Il remarque judicieusement que les fievres quartes d'Automne durent fix mois; par cette raison, que si l'on calcule bien la somme totale des accès qui ont lieu pendant ce tems, elle est de 336 heures, c'est-à-dire de 14 jours, qui est le terme ordinaire des fievres continues qui prennent dans cette faifon. Galien n'est pas éloigné de cette fupputation, quand il dit que la tierce exquise a sept accès, parce que la fievre continue se termine en sept jours, & que chaque accès occupe fon jour (2), c'est-à-dire que, quoiqu'il y ait de la différence entre l'une & l'autre de ces maladies, cependant l'espace de leur durée est le même. (3) En second lieu, dans ces fortes de maladies le fang entre en fermentation, & ne cesse d'y être, que lorsque l'humeur s'est portée aux organes fecrétoires avec lesquels elle a le plus d'analogie, & que la majeure partie de la matiere morbifique a été expulsée au dehors. Troifiémement, comme les liqueurs qui fermentent ont leurs tems de dépuration marquée, (1) De morb. acut. P. m. 95. (2) Comment. in aph. Hippocr. Lib. VI, aph. 591, & de Crifib. Lib. 2, с. 6. (3) Note de l'Editeur. * Ces observations font très-curieuses, sans doute, & très-intéressantes; mais jamais on ne les complettera au point d'en former un corps de doctrine. Quand les Médecins deviendroient assez raisonnables pour ne pas dénaturer les maladies qui nous affligent, en y ajoutant des épiphénomenes, avec leurs prétendus remedes, encore le public les forceroit-il à substituer une médecine souvent imprudente, presque toujours équivoque, & quelquefois meurtriere, à la sagesse de. l'expectation. Vulgus vult decipi. de même, au bout d'un certain tems, le fluide vital est purifié, & débarrassé des humeurs qui l'ont mis en fermentation. Quatrièmement, les symptomes qui accompagnent cette effervescence du sang, ne se soutiennent pas au même degré dans tout le cours de la maladie; mais leur condition est telle, que dans les premiers jours fur-tout, le mal se déclare d'une maniere si manifeste, qu'il n'est pas difficile de juger si l'issue en sera heureuse ou funeste. Les Anciens qui avoient observé cette marche de la fievre, donnerent le nom de jours critiques à ceux où la maladie se terminoit par la guérison, ou par la mort du malade, & celui d'indicateurs de crise à ceux où l'on appercevoit des marques évidentes d'espérance ou de danger. Jusques-là cette science n'étoit pas une affaire de conjecture. Ce font les mauvais raisonnements qu'on a ajoutés aux observations, qui ont rempli cette matiere de doutes. Hippocrate savoit qu'il étoit de la nature d'une maladie aiguë de se terminer en sept, en quatorze ou en vingt-un jours; mais il en ignoroit la cause. L'école de Pythagore, fameuse parmi celles de ce tems-là, faisoit consister sa plus grande science dans l'harmonie & dans les combinaisons mystérieuses des nombres. Les impairs avoient beaucoup plus d'efficacité que les pairs: on attribuoit fur-tout, beaucoup de vertu au fepténaire. Hippocrate suivoit si strictement en ce point la doctrine de ce Philosophe, qu'il craignoit toujours une récidive, quand la fievre quittoit dans un jour pair (1); il attendoit la guérison (1) Aphor. Sect. 4, 36, ! au quatorzieme, ou au vingt-unieme, lorsque la maladie ne s'étoitpas terminée au septieme, parce que le nombre de sept a beaucoup d'influence & fur les maladies & fur les accouchements. (1) Mais après qu'on se fut assuré par l'expérience, que les fievres pouvoient cesser au fixieme ou au huitieme jour, sans crainte de récidive; Afelépiade rejetta ce calcul comme vain (2), & Celse dit que les nombres pythagoriciens avoient fait tomber dans l'erreur les Médecins les plus célebres parmi les anciens (3): Galien s'en appaperçut, & fut plus heureux que les autres dans cette exposition; car ce ne fut point à l'efficacité des nombres impairs qu'il rapporta les accès des fievres & leurs crises, mais à l'influence de la Lune, & à fon empire fur le globe terrestre; empire plus considérable que celui d'aucun des autres astres, & qui vient moins d'une puissance particuliere que de ce que cet astre est plus près de nous. (4) Si donc nous voulons nous en rapporter à lui, » les maladies aiguës >> ont leurs périodes de sept jours, pour leurs >> paroxyfmes & pour leurs terminaisons, & qui » dépendent du cours de la Lune, qui chaque > semaine a beaucoup d'influence, savoir, dans >> fon accroiffement, à fon premier quartier, & >> à fon plein «. [5] Il est clair d'après ce passage, que Galien a saisi la cause qui change les périodes des fievres, mais qu'il n'en a pas mê-. me soupçonné la maniere d'agir. Voici ce qui en eft. (4) De dieb. decretor. Lib. 3. (5) Ibid. La crise n'est autre chose que l'expulfion de la matiere morbifique hors du corps, d'un côté ou d'un autre; & pour qu'elle puisse se faire à l'avantage du malade, cette matiere doit être digérée & atténuée au point de pouvoir passer par les petits couloirs des glandes auxquelles elles se portent. C'est pour cela que, comme il n'est point de meilleure crise des fievres que celle qui se fait par les sueurs, d'abord parce que les glandes de la peau fécernent plus d'humeurs que celles du reste du corps, ensuite parceque leurs canaux excrétoires ayant peu de capacité ne peuvent guere donner issue qu'à une matiere atténuée, & bien digérée; de même, une maladie qui se juge par un flux de fang doit toujours être regardée comme très-grave; car c'est une preuve que le fang ne pouvant se purifier par aucune autre voie, entre dans une effervefcence propre à causer la rupture des vaiffeaux qui le contiennent. La crise moyenne se fait par ces abcès qui se forment dans des parties propres à donner issue aux fucs les plus épais & les plus tenaces. , Il est donc certain que si c'est dans le tems de la nouvelle ou de la pleine Lune que l'humeur peccante cherche à se séparer du sang en fermentation ou que les vaisseaux fanguins dilatés outre mesure, menacent d'une rupture prochaine; la crise se fera d'une maniere d'autant plus facile & plus complette, que l'air ambiant pressera moins sur la superficie du corps, & oppofera une moindre résistance à l'impétuofité des liqueurs. Il peut arriver même, qu'en raison des variétés dont cette cause est sufceptible, une fievre soit jugée la veille du jour où elle devoit l'être, en ne confultant que sa nature, |