penfer, voilà comme ils s'expriment; les paroles font le partage des Mortels. Selon Hérodote, Auteur d'une véracité atroce, le but moral de ces Épîtres fublimes doit être l'amour réciproque des époux après la mort : il eft bon d'en avertir la postérité, qui, fans en être moins clairvoyante, pourroit aifément n'en rien voir. Nous n'avons, Madame, que douze Lettres d'une Religieufe Portugaise à fon Amant ; encore falloit-il que le vice combattu par l'honneur les rendît attachantes reffource aimable, fans doute, mais incompatible avec l'amour fidelle & tendre d'une xij femme pour fon mari; dans un temps auffi chafte que le nôtre, le fuccès de cet amour eft infaillible que de belles vont couronner mon front des rofes de la bienséance! J'ai l'honneur, &c. Beugnes LES SOUPIRS D'EURIDIC E. I. UN cri de furprise & de joie forti du noir Tartare, a retenti jufques dans mon cœur. Déja mon ombre errante fur les bords de l'Achéron, jouit de toute l'admiration dont un Époux fidelle a frappé les Enfers. Oui, c'est Orphée, il vient délivrer fon Époufe des chaînes de la mort. A cette noble audace je reconnois la moitié de moi-même, & je me hâte... Veuillent les juftes Dieux qu'aucune illusion... A non, il n'en est plus au féjour de la vérité, mon cœur m'a prédit Orphée, & je ne puis écrire qu'à mon Époux. Miniftre de la nuit, Afcalaphe conduit la plume privé de la parole, & déformais auffi difcret que le filence même, il va, nouvel habitant des airs, de fon aîle étendue, traversant l'Élisée jufqu'aux Royaumes fombres, feconder mon amour malheureux & tes fublimes deffeins. Mais tout fon zèle peut à peine fuivre ma voix, mes idées, mes fentimens, & cette ardeur impatiente plus rapides que l'inftant qui s'envole. Je parle au fils des Dieux, au Prêtre de la Grèce, au législateur des hommes; il m'écoute, il m'entend, oui, ta loi la plus chere eft de te réunir à l'ombre d'Euridice. Oui, j'allois moi-même, j'allois fur la terre errer autour de toi, je voulois recueillir tes larmes, confondre encore mon ame |