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non-seulement que le vin était connu en Egypte, mais encore qu'on en faisait usage dans les sacrifices. Rosellini a ajouté sur le même sujet de nouveaux détails à ceux que l'on connaissait déjà.

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Un monument extrêmement curieux réclame maintenant toute notre attention, c'est un vase découvert aux environs de Rome en 1696, et qui représente très en grand, et avec plus de détails, le même sujet que nous avons vu sur les médailles d'Apamée il s'agit du déluge. Mais au lieu de médailles ce sont ici des figurines placées dans un vase pour représenter une scène du déluge. Il y a vingt couples d'animaux et plus de trente-cinq figures humaines, quelques-unes isolées, d'autres en groupes, mais toutes dans la posture de quelqu'un qui cherche à échapper à une inondation. Toutes les femmes sont portées sur les épaules des hommes. On présume que c'était un des vases dont on se servait dans la célébration de l'hydrophoria, ou commémoration du déluge. La beauté du travail de toutes ces figurines fait supposer qu'elles sont d'une haute antiquité; mais aucun renseignement ne permet d'assigner une date à ce singulier monument.

Le professeur Rosellini a le premier fait remarquer un synchronisme curieux entre Roboam, roi des Juifs, et Shishak (Sesac), roi d'Egypte. Ce roi d'Egypte est omis par Hérodote et Diodore, quoique Manéthon en parle sous le nom de Sejonchis: plusieurs monuments lui donnent le nom de Shishonk. Rosellini regarde cette concordance entre les annales des deux peuples comme la base naturelle de tout système de chronologie égyptienne et il existe un monument qui établit complètement cette concordance, et offre en même temps une des confirmations les plus frappantes de l'histoire sacrée.

Le troisième livre des Rois (XIV, 25) et le second des Paralipomènes (XII, 2)rapportent que Shishak, roi d'Egypte, marcha contre Juda dans la cinquième année du règne de Roboam; il pilla le temple et réduisit le peuple en esclavage. Dans la grande Cour de Karnak on reconnaît, parmi un grand nombre de captifs, le roi des Juifs les mains liées sur le dos; il a le profil bien connu de la race juive, profil dans lequel M. de Paravey croit retrouver le type de figure attribué par la tradition à notre Sauveur. Mais, ce qui lève tous les doutes, c'est que, sur un bouclier qui

porte ce personnage, on lit en hieroglyphes son titre : Roi des Juifs. On peut dire qu'aucun monument découvert jusqu'à ce jour n'a donné une preuve aussi convaincante de l'authenticité de l'Ecriture-Sainte '.

A l'époque où M. Wiseman a terminé son ouvrage, M. Caillaud n'avait pas publié ses Recherches sur les arts, etc., des anciens peuples de l'Egypte, etc. Dans les planches nombreuses qui composent cet ouvrage, il aurait trouvé l'explication de plusieurs passages de l'Ecriture dans lesquels on fait allusion aux coutumes des Egyptiens, particulièrement sur la paille et le chaume que les Israëlites étaient obligés de se procurer pour les travaux auxquels on les forçait (Exod. v, 6, 7, 12. 2.), sur la manière de séparer la paille du grain qui venait d'ètre foulé ( Ps. 1, 4; Isaïe, 24; Math. 111, 12.) La manière de conserver le poisson, si abondant dans les rivières, explique les murmures des Hébreux dans le désert (Nomb. x1, 4, 5, 6.). L'usage d'arroser par des rigoles que l'on ouvre ou que l'on bouche avec le pied, éclaircit un passage du Deuteronome (x1, 10, 11) où l'on fait allusion à cette pratique. Les chevaux qu'on voit sur les monuments semblent appartenir à la belle race des Dongola, et Salomon a donc pu en faire venir pour monter sa cavalerie (II Paralipom. 1x, 28). Tous les arts, indiqués jusque daus leurs moindres détails avec un soin si minutieux, sont une peinture vivante des mœurs de ces temps antiques : c'est ainsi que l'on voit filer le lin et fabriquer les étoffes, et jusqu'aux couleurs indiquées dans l'Exode ( xxxv, 25). Mais un des exemples les plus remarquables, c'est l'explication du titre du Ps. 44 (Eructavit ). Ce psaume est regardé par quelques auteurs comme un chant nuptial pour le mariage de Salomon avec une fille de Pharaon, bien qu'on admette généralement qu'il se rapporte prophétiquement à la grâce et à la majesté du royaume du Messie. On traduit ainsi le titre de ce psaume : Au chef musicien (pour être chanté) sur le Shoshanim (Hexachorde), pour les enfants de Koré, Maschil, chant d'amour. Shoshanim signifie des lis (lotus); or, les choristes des temples et des palais des rois avaient la tête ornée de lis (comme on le voit dans l'ouvrage de M. Caillaud); en leur qualité de suivantes de la princesse, c'était à elles qu'il appartenait de chanter l'ode d'byménée. Les treizième et quatorzième versets contiennent la des. cription des étoffes dont la fabrication se voit sur les monuments.

(Note du traducteur. }

Les études orientales sont l'objet des dixième et onzième discours, et comme ces études se partagent naturellement en deux branches, la littérature sacrée et la littérature profane, chacune devient l'objet d'un discours en particulier.

Ce serait en vain que dans l'espoir d'un plus grand succès on chercherait en faveur du Christianisme des preuves auxiliaires ou des documents confirmatifs de ses livres sacrés ailleurs que dans le pays où il a pris naissance : l'Orient est le berceau des nations; là, naquirent les espèces primitives, et là, elles se renouvelèrent après le déluge. Mais, dénué en apparence du pouvoir de donner à ses habitants le dernier développement de l'énergie intellectuelle, tandis qu'il leur prodigue la vie physique dans le plus haut degré de perfection, l'Orient les a engendrés et préparés de telle sorte que, soumis à des influences convenables, ils sont parvenus au dernier degré possible de civilisation, de lumières et de puissance.

Les nations de l'Asie ont un caractère de fixité inaltérable qu'on chercherait vainement chez aucun peuple de l'Europe; on ne pourrait se figurer la manière d'être des Européens, il y a deux siècles, par celle que l'on observe aujourd'hui. Mais en Orient nous trouvons les Chinois absolument tels que les représentent leurs plus anciennes traditions : les Mongols et les Turcomans, avec leurs maisons roulantes et leurs troupeaux errants, mènent la vie des anciens Scythes; le brahme fait les mêmes ablutions, et au même fleuve, comme ses ancêtres il y a deux mille ans; l'Arabe boit aux mêmes sources et suit les mêmes sentiers que le Juif à sa sortie d'Egypte. C'est donc dans ces contrées qu'il faut chercher tout ce qui rappelle l'histoire primitive de l'homme et l'explication des allusions coutenues dans l'Ecriture-Sainte. Les matériaux sont tellement abondants pour cette partie de nos recherches, qu'il est nécessaire de les diviser en deux classes: la première comprendra les recherches critiques, et la seconde les recherches philologiques. Dans ce discours, on ne s'occupe que des études qui ont rapport au texte de l'Ecriture.

La science critique que les Allemands appellent l'Exegèse, est le fondement de ces recherches; elle remonte aux premiers siècles de l'Eglise cette science s'enquiert des véritables mots de chaque texte pris séparément, puis examine les différences qui peuvent

se trouver entre chaque texte. L'influence de cette étude sur les preuves en faveur du Christianisme est nécessairement très-grande; en voici des exemples: le verset 17 du psaume xxi a été l'occasion d'un grand nombre de dissertations; il s'agissait de savoir si le mot cari doit se lire de manière que la phrase signifie, selon les Septante, «< ils ont percé mes mains et mes pieds » (mots prophétiques appliqués à Jésus-Christ), ou s'il faut lire avec les Juifs et les théologiens rationalistes : « Mes mains et mes pieds sont semblables à un lion. » Le nouveau Testament fournit encore plus d'exemples de l'importance de la critique. Indépendamment de l'éternelle querelle qui s'agite encore pour savoir si le célèbre verset des trois témoins (Jean I, v. 7) fait partie du texte original, ou si c'est une interpolation, le passage de Timoth. (111, 16) a い soulevé une dispute bien plus grave. Il s'agit de savoir s'il faut lire : : « Dieu apparut dans la chair, » ou « qui apparut dans la chair. » Toute la difficulté repose sur la barre transversale de la lettre grecque ; car le mot OS, qui, sera l'abréviation de theos, si l'O est barré. On a eu recours au microscope pour s'assurer de l'existence de la barre, et, à force d'ètre examinée et de passer de mains en mains, la barre et la lettre, tout a disparu; c'était sur un célèbre manuscrit que l'on s'exerçait ainsi, le manuscrit Alexandrin du musée britannique. Un manuscrit de Paris (le Codex Ephrem) présente la même incertitude dans la forme de cette même lettre.

Lorsque l'invention de l'imprimerie eut rendu le texte de la Bible accessible à tous, une discussion s'éleva sur son exactitude, et, voyant que dans quelques endroits le texte différait des versions, on soupçonna les Juifs d'avoir altéré leurs manuscrits; on prétendit même que les versions devaient être préférées au texte original. On s'occupa enfin sérieusement de l'examen des manuscrits, et il fut prouvé d'une manière évidente que les Juifs avaient conservé le volume sacré, pur de toute mutilation. Beaucoup de savants hommes se sont livrés à la recherche et à la collation des manuscrits: Michaëlis et le père Houbigant parurent les premiers dans cette carrière; mais ils furent bientôt dépassés par le savant Benjamin Kennicott. En 1680, il publia à Oxford sa grande Bible critique, fruit de dix ans de travaux, pendant lesquels il compulsa près de six cents manuscrits, qu'il alla chercher dans toutes

les parties de l'Europe: il trouva à Rome tout l'accueil et tous les renseignements qu'il pouvait désirer; ce qui dément l'assertion de quelques auteurs, que l'Eglise ne voit pas avec plaisir la publication des textes originaux, à cause des différences qui peuvent se trouver avec les versions reçues. Nous verrons tout à l'heure quelle est la valeur de cette dernière supposition. L'homme le plus étonnant pour sa persévérance et son habileté à se procurer des manuscrits est certainement Jean-Bernard de Rossi, professeur à Parme; pauvre et modeste, il a trouvé le moyen, non pas seulement de lire, mais d'acquérir six cent quatre-vingts manuscrits hébreux; tandis que les plus célèbres bibliothèques de l'Europe en possèdent à peine trente à quarante chacune. Cette riche et unique collection fait partie maintenant de la bibliothèque de Parme, à qui Rossi l'a léguée par son testament.

Après avoir recueilli un aussi grand nombre de manuscrits, la pensée dut venir de les examiner et de les comparer, afin de reconnaître en quoi ils différaient soit entre eux soit avec les versions les plus accréditées : beaucoup de temps et de science ont été prodigués dans ce long et penible travail, et il est satisfaisant de voir qu'on n'a pu rien découvrir qui ait jeté le moindre doute sur aucun des passages considérés auparavant comme certains et décisifs en faveur de quelque point important de la doctrine sacrée. Les différences de texte laissent intactes les parties essentielles de chaque phrase, et n'ont rapport qu'à des points d'une importance secondaire, tels que l'insertion ou l'omission d'un article ou d'une conjonction, l'exactitude plus ou moins grande d'une construction grammaticale, et la forme plutôt que la substance des mots. Ces résultats sont communs à l'un et à l'autre Testament. Eichhorn et Kennicott sont d'accord sur ce point; et dans ces dernières années, un fait inattendu en a donné une nouvelle et frappante confirmation; nous voulons parler du manuscrit que le docteur Buchanan apporta en Europe, et dont se servaient les Juifs de race noire établis dans l'Inde de temps immémorial, et depuis des siècles séparés de leurs frères des autres parties du monde. C'est un fragment d'un immense rouleau; il contient une partie considérable du Pentateuque. M. Yeates l'a publié, et il résulte de son travail qu'il n'existe pas entre les deux textes plus de quarante différences, dont aucune n'a la moindre valeur; elles ne concernent pour la

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