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Hist. lit. Encyclopédie. ig.

OU

DICTIONNAIRE RAISONNÉ

DES SCIENCES,
DES ARTS ET DES MÉTIERS,

PAR UNE SOCIÉTÉ DE GENS DE LETTRES.

MIS EN ORDRE ET PUBLIÉ PAR M. ***.

Tantùm feries juncturaque pollet,
Tantum de medio fumptis accedit honoris ! HORAT.

TOME HUITIEM E.

H=IT

A NEUFCHASTE L;

CHEZ SAMUEL FAULCHE & Compagnie, Libraires & Imprimeurs.

BIBLIOTHECA

REGIA

MONACENSIS.

AVERTISSEMENT.

ORSQUE nous commençâmes à nous occuper de cette Entreprise, la plus vaste peut-être qu'on ait jamais conçue en Littérature, nous ne nous attendions qu'aux difficultés qui naîtroient de l'étendue & de la variété de fon objet, mais ce fut une illufion paffagere, & nous ne tardâmes pas à voir la multitude des obftacles phyfiques que nous avions preffentis, s'accroître d'une infinité d'obstacles moraux auxquels nous n'étions nullement préparés. Le monde a beau vieillir, il ne change pas; il se peut que l'individu fe perfectionne, mais la maffe de l'efpece ne devient ni meilleure ni pire; la fomme des paffions malfaifantes refte la même, & les ennemis de toute chose bonne & utile font fans nombre aujourd'hui comme autrefois.

De toutes les perfécutions qu'ont eu à fouffrir dans tous les tems & chez tous les peuples, ceux qui fe font livrés à la féduifante & dangereufe émulation d'infcrire leurs noms dans la lifte des bienfaiteurs du genre humain, il n'en eft prefqu'aucune qu'on n'ait exercée contre nous. Ce que l'Hiftoire nous a tranfmis des noirceurs de l'envie, du menfonge, de l'ignorance, & du fanatifme, nous l'avons éprouvé. Dans l'efpace de vingt années confécutives, à peine pouvons-nous compter quelques inftans de repos. Après des journées confumées dans un travail ingrat & continu, que de nuits paffées dans l'attente des maux que la méchanceté cherchoit à nous attirer! Combien de fois ne nous fommes-nous pas levés incertains, fi cédant aux cris de la calomnie, nous ne nous arracherions pas à nos parens, à nos amis, à nos concitoyens, pour aller fous un ciel étranger chercher la tranquillité qui nous étoit néceffaire, & la protection qu'on nous y offroit! Mais notre patrie nous étoit chere, & nous avons toujours attendu que la prévention fit place à la juftice. Tel eft d'ailleurs le caractere de l'homme qui s'eft propofé le bien, & qui s'en rend à luimême le témoignage, que fon courage s'irrite des obftacles qu'on lui oppofe, tandis que fon innocence lui dérobe ou lui fait méprifer les périls qui le menacent. L'homme de bien eft fufceptible d'un enthousiasme que le méchant ne connoit pas.

Le fentiment honnête & généreux qui nous a foutenus, nous l'avons auffi rencontré dans les autres. Tous nos Collegues fe font empreffés à nous feconder; & c'est lorfque nos ennemis fe félicitoient de nous avoir accablés, que nous avons vu des hommes de lettres & des

gens du monde qui s'étoient jusqu'alors contentés de nous encourager & de nous plaindre, venir à notre secours & s'affocier à nos travaux. Que ne nous eft-il permis de défigner à la reconnoiffance publique tous ces habiles & courageux auxiliaires! mais puifqu'il n'en eft qu'un feul que nous ayons la liberté de nommer, tâchons du-moins de le remercier dignement. C'eft M. le Chevalier de Jaucourt.

Si nous avons pouffé le cri de joie du matelot, lorsqu'il apperçoit la terre, après une nuit obscure qui l'a tenu égaré entre le ciel & les eaux, c'eft à M. le Chevalier de Jaucourt que nous le devons. Que n'a-t-il pas fait pour nous, fur-tout dans ces derniers tems? Avec quelle conftance ne s'est-il pas refufé à des follicitations tendres & puiffantes qui cherchoient à nous l'enlever? Jamais le facrifice du repos, de l'intérêt & de la santé ne s'est fait plus entier & plus abfolu. Les recherches les plus pénibles & les plus ingrates ne l'ont point rebuté. Il s'en eft occupé fans relâche, fatisfait de lui-même, s'il pouvoit en épargner aux autres le dégoût. Mais c'eft à chaque feuille de cet Ouvrage à fuppléer ce qui manque à notre éloge; il n'en eft aucune qui n'attefte & la variété de fes connoiffances & l'étendue de ses secours.

Le Public a jugé les fept premiers volumes; nous ne demandons pour ceux-ci que la même indulgence. Si l'on ne veut pas regarder ce Dictionnaire comme un grand & bel ouvrage, on fera d'accord avec nous, pourvû qu'on ne nous envie pas jufqu'à l'avantage d'en avoir préparé les matériaux. Du point d'où nous fommes partis jufqu'au point où nous fommes arrivés, l'intervalle étoit immenfe ; & pour atteindre le but que nous avons eu la hardieffe ou la témérité de nous propofer, peut-être ne nous a t-il manqué que de trouver la chofe où nous la laiffons, & d'avoir eu à commencer où nous avons fini. Graces à nos travaux, ceux qui viendront après nous pourront aller plus loin. Sans prononcer fur ce qu'ils auront encore à faire, nous leur transmettrons du-moins le plus beau recueil d'instrumens & de machines qui ait exifté, avec les Planches relatives aux arts méchaniques*, la description la plus complette qu'on en ait encore donnée, & fur toutes les sciences une infinité de morceaux précieux. O nos Compatriotes & nos Contemporains, avec quelque févérité que vous jugiez cet Ouvrage, rappellez-vous qu'il a été entrepris, continué, achevé par un petit nombre d'hommes ifolés, traversés dans leurs vues, montrés fous les afpects les plus odieux, calomniés & outragés de la maniere la plus atroce, n'ayant d'autre encouragement que l'amour du bien, d'autre appui que quelques fuffrages, d'autres fecours que ceux qu'ils ont trouvés dans la confiance de trois ou quatre commerçans.

* Nous prévenons ici qu'on a suppléé des détails importans à la plupart de ces arts, par des explications trèsétendues & très-inftructives qu'on trouvera au Recueil des Planches, à la tête de celles qui les concernent; & que quant à d'autres arts, que la célérité de l'édition n'a pas permis de placer felon leur ordre alphabétique, on en a renvoyé la description entiere foit à la fin du dix-feptieme Volume de Difcours, foit au Recueil même des Planches; en forte que les Volumes de Difcours, & les Volumes des Planches s'éclairent, fe corrigent, & fe complettent réci proquement. Tome VIII.

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